BASQUE-FRANÇAIS



             traduction

            







Le bonheur des campagnes -3-

Quelques semaines plus tôt, ayant aperçu dans la forêt, un essaim d’abeilles qui bourdonnait, Pierre lui jeta devant , par poignées, du gravier, des brindilles et des feuilles, et aussi le cri le plus affectueux : " Prends Marie, Prends Marie ! " Et l’essaim d’abeilles se fixa au chêne, en deux coups de hache, il fit tout de suite une croix. A partir de ce moment l’essaim d’abeilles était le sien, personne, jamais au village, n’oserait de ce fait toucher à l’essaim, et, si quelqu’un s’y aventurait, il est sûr que ses chères abeilles lui mouraient. Ensuite, Pierre leur apporta une belle ruche, et il la plaça tout prés du chêne. Et les pauvres abeilles, lentement, entrèrent dans la ruche, comme les oiseaux dans leur nid, immédiatement complètement familiarisées, tout de suite appliquées à leur véritable travail le miel, volant à coups d’ailes de la ruche aux fleurs, des fleurs à la ruche.

Et, là, prés d’Oihanalde, Pierre pensa qu’eux (les gens du village) allaient chez eux plus volontiers que l’essaim dans la ruche. Ils ne voulaient pas de meilleur refuge, ni ceux qui restent au village, ni non plus ceux qui à travers les océans sont un jour partis aux Amériques, loin du village, parfois encore sur le point de revenir là-bas. Même les morts étaient en train de marcher par-là, comme les vivants le sentaient parfois, ils étaient venus au lieu habituel tout silencieux, sans jamais effrayer personne, revenus aider ceux qu’ils avaient tant aimés…. Et Pierre entra dans la cuisine chaude, ces douces pensées dans le cœur.

Jean Barbier, né le 9 juillet 1875 à Saint-Jean-Pied-de-Port
et mort le 31 octobre 1931 à Saint-Pée-sur-Nivelle, est un prêtre
et écrivain basque d'expression navarro-labourdine.