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FERNAN DE MAGELLAN -Sebastian El Cano

http://magellan.site.voila.fr/page6.html

FERNAN DE MAGELLAN Sabrosa 1480 - Philippines 1521


Avec une flotte de cinq navires et 237 hommes, Fernão de Magalhães part le 10 août 1519 de Séville. Ses bateaux voguent vers le port de San Lucar de Barrameda. Là, ils sont approvisionnés et vérifiés pour la dernière fois avant le grand voyage. La cargaison se compose de farine, haricots, lentilles, riz, 570 livres de porc, 200 tonneaux de sardines, 984 fromages, 450 cordons d'ail et d’oignon. 1512 livres de miel, 3200 livres de raisins secs. Pour le moral des marins, du Xeres.
Le 20 septembre 1519, à l'aube, après avoir passé en revue l'équipage qu’il a fait recruter, comme c’en était l’usage, dans les ruelles ou les tavernes, au son des coups de canons, il ordonne à sa flotte de quitter San Lucar. Magellan rêve-t-il de trouver ce passage vers l'ouest qui le mènerait vers l'Asie ?

Trois mois plus tard, le 13 décembre 1519, les navires atteignent ce que l’on appellera la baie de Rio de Janeiro. Les équipages se ravitaillent et procèdent aux réparations. Les habitants de ces terres se montrent doux et amicaux, mais n’en sont pas moins… cannibales. Les marins découvrent de nouveaux fruits comme les ananas ou les "batates" et la canne à sucre. Il y vivent des moments paisibles, se divertissant avec les jeunes filles locales qu'ils achètent (eh oui) pour peu.
Début janvier 1520, Magellan, ayant repris la mer, vogue vers le sud en longeant les côtes brésiliennes et croit avoir trouvé le passage tant recherché. Ce n'est qu'illusion. Il faut descendre plus encore, vers les eaux froides de l’Antarctique. Une mutinerie se déclare, fomentée par Juan de Cartagena, grand d’Espagne. Magellan y met un terme : mutins décapités, poignardés, écartelés.
Magellan découvre une baie inconnue. Il lui donne le nom de Baie de San Julian. La flotte installe ses quartiers d’hiver pendant cinq mois en ce lieu inhospitalier. Reprenant la mer, l’un des navires part en exploration mais fait naufrage. Magellan décide de poursuivre son voyage quelques soient les conditions climatiques. Il découvre le détroit qui porte son nom, donnant sur l’Océan Pacifique. Il nomme Terre de Feu les territoires de la côte, en raison des nombreux feux allumés par les populations locales.
Une seconde mutinerie se déclenche. En effet, l’un des navires, le San Antonio, rebrousse chemin toutes voiles en direction d’Espagne.
Pour les autres navires, l’Océan s’ouvre. Le scorbut fait son apparition. Une vingtaine d'hommes en meurent. Le 6 mars 1521, la flotte atteint les îles des Mariannes, trois semaines plus tard, les Philippines.
Grâce à son fidèle domestique, Enrique de Malacca, qui connait la langue des indigènes, Magellan noue amitié avec Humabon, le roi de l’île Cebu. Ce dernier se convertit à la religion catholique, ainsi que la population. Les îles se lient d’amitié avec Magellan, à l’exception de Mactan dont le roi Lapu-Lapu ne se laisse ni séduire ni impressionner. Défié, Magellan débarque sur l’île de Mactan. Mortellement blessé lors du combat, il meurt le 27 avril 1521.
Privés d'un nouveau navire, la Conception, les équipages reprennent la mer et atteignent les Moluques le 6 novembre 1521. Les marins s'y reposent et achètent des épices. Les deux derniers navires de la flotte quittent ces îles le 27 décembre 1521. L'un des navires, la Trinidad, présente de graves avaries. Seule la Victoria poursuit son voyage de retour. Commandé par Sebastian Del Cano, le navire traverse l'Océan Indien, remonte vers l'Europe en longeant les côtes africaines. Les marins ne sont plus qu'une trentaine quand ils abordent les îles du Cap-Vert où 13 d’entre eux sont faits prisonniers par les Portugais.
Le 6 septembre 1522, les dix huit derniers survivants européens et trois indiens arrivent dans le port de San Lucar, en Andalousie…
Cette expédition a accompli le premier tour du monde. Elle a permis de confirmer la rotondité de la Terre, la possibilité de joindre l'Orient par l'ouest et le fait que l'Amérique soit bien un continent à part. Mais plus précieux encore que les trois cent quintaux d’épices que Del Cano rapporte du voyage, le chroniqueur Antonio Pigafetta, jeune sous-lieutenant italien embarqué à bord du vaisseau-amiral, revient avec le récit de cette prodigieuse épopée dont il a quotidiennement consigné les notes dans un précieux carnet de bord...

Selon le point de vue très matérialiste et par conséquent étroit des historiens officiels, le moteur principal de l'aventure qui conduit Magellan à accomplir son tour du monde serait la quête des épices (poivre, safran, musc, cannelle, etc.). En provenance des Indes, des Célèbes, de Bornéo, de Sumatra et des Moluques, ces denrées sont prisées sur les tables raffinées d’Europe, mais leurs prix sont prohibitifs depuis que les Turcs contrôlent la Méditerranée orientale.
Ces épices, toutes les nations européennes s'y intéressent. Venise et Gênes en font le commerce avec les ports d'Alexandrie et de Constantinople. Le roi d'Angleterre Henri VII envoie Giovanni Caboto, que les Anglais appellent John Cabot, qui estime que l’on peut, par le nord de l'Amérique, atteindre les Indes – expédition qui le mène aux froids rivages de Terre-Neuve. Les Catalans en importent depuis Beyrouth ou la Syrie; les Portugais choisissent la voie africaine, s'établissent à Calicut, Goa et Ormuz, puis à Malacca en 1511. Ils atteignent les Moluques en 1512: Lisbonne devient la capitale européenne des épices.
L'année suivante, Vasco Núñez de Balboa découvre les Mers du Sud. Est-il possible d'éviter le long chemin contournant l’Afrique ? Les navigateurs espagnols, portugais et anglais, cherchent le passage le long des côtes de l'Amérique septentrionale. Comme ses contemporains, Magellan pense que les continents sont de gigantesques îles, et qu’en longeant la côte du Nouveau Monde vers le sud, il touvera le passage vers l’autre mer. Ces explorations s'inscrivent dans le cadre légal des ordonnances fixées à l'Espagne et au Portugal par le souverain pontife Alexandre VI (1493) et par le traité de Tordesillas (1494): les deux nations rivales se partagent le monde, la frontière qui délimite leurs espaces respectifs passe à 370 lieues à l'ouest du Cap Vert, en plein Océan Atlantique. Rien n'étant précisé quant à l'"anti-méridien", les Espagnols s'estiment autorisés à prendre possession des îles aux Epices dont les coordonnées ne sont pas clairement établies.


Magellan


Fernão de Magalhães est né en 1470 ou 1480 au Portugal, dans une famille de petite noblesse. Orphelin à l'âge de 11 ans, il devient page de la reine Leonor de Lancaster. Est-ce le spectacle de l'escale que fit Christophe Colomb à Lisbonne en mars 1493 qui éveille son désir d'aventures ?
Il acquiert une solide expérience de marin en naviguant autour de l'Afrique (Tanzanie, Mozambique, Kenya, Madagascar) sous les ordres du premier vice-roi de l'Inde Francisco de Almeida en 1505, de Nuno Vaz de Pereira en 1506 et du général Diego Lopes de Sequeira en 1508. Il prend part à de rudes combats contre les indigènes au cours desquels il sauve la vie de Sequeira et de Francisco Serrão. Il participe, avec le nouveau vice-roi Afonso de Albuquerque, à la conquête de Goa – capitale de l'Inde portugaise de 1510 à 1961– et de Malacca, qui restera sous la bannière du Portugal pendant 130 ans.
Revenu au Portugal, il s'engage dans la grande expédition africaine de Jaime de Braganza (1512-1514): il est blessé au Maroc et accusé d'irrégularités dans le partage d'un butin. Le roi Dom Manuel lui refuse honneur et récompense. Il tombe en disgrâce.
C'est alors que Magellan reçoit des nouvelles de son ami Francisco Serrão, établi aux Moluques et qui le presse de venir le rejoindre. N’obtenant rien de son pays, le Portugal, il se rend à Séville, en compagnie de son compatriote le cosmographe Ruy Faleiro, avec qui il rédige son projet de découverte des îles des Épices destiné au roi d'Espagne. Là, il fait la connaissance d'un autre Portugais, Diego de Barbosa, titulaire du prestigieux titre d’Alcalde des Arsenaux de Séville, qui lui donne la main de sa fille Beatriz, l'introduit à la Casa de la Contratación dont l’inspecteur principal, Juan de Aranda, lui apporte son aide. Son beau-père lui obtient une audience royale à Valladolid en janvier 1518. C'est ainsi que sont signées des capitulaciones entre Charles Ier et les deux requérants.
Le Portugal voit d'un mauvais œil cette concurrence : l’on songe à éliminer physiquement le navigateur. L’Espagne, pourtant engagée dans le projet, redoute l’entreprise en raison de l'origine portugaise de son initiateur.

LA TRAVERSEE DE L'ATLANTIQUE


La flotte comprend cinq navires, Trinidad (110 tonneaux), San Antonio (120 tx), Concepción (90 tx), Victoria (85 tx) et Santiago (75 tx), sur lesquels embarquent 237 hommes, dont la plupart (139) sont des Espagnols, principalement andalous, basques, castillans et galiciens. Mais l’on compte également 41 Portugais, 21 Italiens, 19 Français, des Flamands, des Allemands, des Noirs et deux Malais, esclaves de Magellan, destinés à servir de "truchements" (interprètes) aux îles des Épices.
Après avoir juré loyauté au roi et reçu l'étendard royal dans l'église de Santa María de la Victoria à Séville, Magellan appareille le 10 août 1519 et se dirige vers les Canaries où il fait une brève escale avant d'entreprendre la traversée de l'Atlantique.
Tout le voyage est marqué par un climat de défiance qui dresse les Espagnols contre leur commandant portugais. La flotte touche le continent américain à la fin décembre près de l'actuelle Recife, au Brésil, et entreprend de longer la côte vers le sud, entrant dans toutes les baies pouvant évoquer l'ouverture du passage recherché.

LA MUTINERIE


Fin mars 1520, Magellan décide d'hiverner dans la baie de San Julián, par 49° sud, pendant les cinq mois de la mauvaise saison. Il mate une grave mutinerie qui éclate sur trois des cinq navires, au cours de laquelle le capitaine rebelle de la Victoria, Luis de Mendoza, est tué. Il fait décapiter un autre des meneurs, Gaspar de Quesada, le capitaine de la Concepción, et sans craindre l’autorité des institutions qu’ils représentent, il en abandonne deux à terre: Juan de Cartagena, l'ancien capitaine de la San Antonio, grand d’Espagne et neveu de l’Evêque de Burgos ainsi que le prêtre, Pedro Sánchez de la Reina, qui a pris le parti des mutins.
Ne perdant pas de vue le but de l'expédition, Magellan envoie le Santiago explorer une baie voisine. Le bateau fait naufrage, ses hommes réussissent toutefois à regagner San Julián par la terre. C'est à San Julián que les navigateurs voient leurs premiers lamas, ainsi que les fameux Patagons, littéralement, les hommes aux grands pieds, d'où le nom de la Patagonie.
Magellan reprend son chemin vers le sud à la fin août 1520. Le temps est exécrable, c’est l’hiver austral. Les navires passent encore deux mois à l'abri, devant l'embouchure du fleuve Santa Cruz. Le 21 octobre, il se trouve devant un cap qu'il baptise des Onze Mille Vierges, selon le calendrier catholique qui fête ce jour-là Sainte Ursule et ses onze mille compagnes massacrées à Cologne. Le 1er novembre, la flotte s'engage dans le labyrinthe que Magellan appelle de Tous les Saints. Au cours de sa traversée, il aperçoit des feux sur la rive opposée, terre qu'il baptise la Terre des Feux. Lors de l'exploration d'un chenal, le pilote du San Antonio, le Portugais Estevão Gomes, s'empare de son navire, met son capitaine aux fers et reprend le chemin de l'Espagne, voulant, dit-il, y apporter la nouvelle de la découverte et revenir avec de nouveaux navires mieux approvisionnés et en meilleur état.
Le mercredi 28 novembre 1520, les trois bateaux qui restent passent le cap Deseado, "le Cap du Désir, comme une chose bien désirée et de longtemps" et entrent dans "la mer grande et large", le Pacifique.

  

LA MER DU SUD


Magellan met alors le cap sur les îles Moluques, dont il sait, par son ami Serrão, qu'elles se situent sur l'équateur. Une traversée qui prendra presque quatre mois. Le 24 janvier 1521, ils découvrent une petite île qu'ils appellent San Pablo, puis une autre, baptisée Tiburones, "l’île des Requins". Il s'agit probablement de l'atoll de Fakahina (Tuamotu, Polynésie française). Quant à la deuxième, c'est sans doute Flint, dans les îles de la Ligne (Kiribati).
La traversée se poursuit, par temps favorable, jusqu'au 6 mars où apparaissent deux petites îles hautes, plus tard appelées les Mariannes : Rota et Guam. Après plus de trois mois de mer – dix-huit depuis le départ de Séville – l'escale est prometteuse, mais "les gens de ces îles nous dérobèrent avec grande adresse et diligence le petit bateau qui était amarré à la poupe du navire du Capitaine." D'abord baptisées Îles des Voiles Latines, en raison de la forme des voiles utilisées par les rapides pirogues des indigènes, elles prennent le nom peu flatteur d'Îles des Larrons.
Les navires reprennent la mer et, le 27 mars, atteignent un archipel encore inconnu, que Magellan baptise "de Saint-Lazare", du nom du martyr que l'on fêtait ce jour-là. Ce sont les îles Philippines.

LA MORT DE MAGELLAN


Le jour de Pâques de l’année 1521, Magellan fait dire la première messe sur le sol philippin. Un pilote local conduit la flotte jusqu'à Cebu : à la surprise générale, Enrique, l’esclave et serviteur de l’Amiral comprend la langue des indigènes. Le roi Humabón se lie rapidement d’amitié avec l’Amiral. Le dimanche 14 avril, —nous baptisâmes huit cents personnes —Humabón reçoit le prénom du roi d'Espagne, Charles. Magellan remet à la reine de l’île une statuette de bois représentant l'Enfant Jésus que lui avait donnée l'archevêque de Séville avant son départ : c’est encore aujourd'hui cinq cent ans plus tard, l'objet d'un culte, dans l'église de Saint-Augustin de Cebú, appelée Basílica del Santo Niño.
Grâce à Humabón, dont il devient l’ami inséparable, Magellan obtient l'adhésion de tous les souverains voisins, à l'exception de Lapu-Lapu, roi de l'île de Mactan. Il décide de l'affronter et se rend sur cette île avec 60 de ses hommes. La rencontre a lieu le 27 avril au matin. Elle tourne à la déroute pour les Espagnols qui laissent sur le rivage treize morts dont Magellan lui-même.

Après l’échec sanglant subit sur l’île de Mactan, le commandement de la flotte échoit à Duarte Barbosa, proche parent de Magellan. Le nouveau capitaine commet la maladresse de ne pas exécuter le testament de Magellan qui prévoyait qu’à sa mort, Enrique serait affranchi. Ce dernier, refusant de servir quelque nouveau maître, se révolte : étant seul à maîtriser parfaitement la langue des indigènes, il conseille au roi Humabon d’organiser un banquet auquel le nouveau commandant et tous les espagnols seraient conviés. Au meilleur moment du festin, quand les prudences seraient assoupies, sur un signal, tous seraient tués. Seuls quelques marins réussissent à regagner les navires.

Avant de prendre le chemin des Moluques, qu'ils savaient proches, les rescapés, trop peu nombreux pour se répartir en trois équipages, brûlent la Concepción : il ne reste que deux navires, la Trinidad, commandée par João Lopes Carvalho, qui assume également la direction de la flotte, et la Victoria, sous les ordres de Gonzalo Gómez de Espinosa – tous les deux avaient quitté à temps le banquet de Humabón.

  

LES MOLUQUES


Les deux navires font différentes escales de ravitaillement. Carvalho est destitué par ses compagnons et remplacé par Gómez de Espinosa, Juan Sebastián Elcano devenant capitaine de la Victoria. Grâce à des pilotes locaux, le 8 novembre 1521, 27 mois après leur départ de Séville, les deux navires atteignent Tidore, dans les Moluques, les îles des Épices.
Là, ils constatent la présence des Portugais. Francisco Serrão, l'ami de Magellan, qui était devenu conseiller du roi de Ternate, est mort depuis peu. Après avoir acquis une grande quantité de clous de girofles, ils décident de rentrer au plus vite en Espagne. Une voie d'eau s'étant déclarée sur la Trinidad, Espinosa décide qu'elle serait calfatée sur place. Ce navire ne reprendra la mer que plus tard, tandis que la Victoria tentera seule le retour par la route africaine.

GOMEZ DE ESPINOZA, COMMANDANT DE LA TRINIDAD


Gómez de Espinosa, alors âgé d'environ 33 ans, originaire de la région de Burgos, avait embarqué sur la Trinidad comme grand officier de justice et avait résolument pris le parti de Magellan lors de la mutinerie de San Julián. Il installe la présence espagnole à Tidore, un petit comptoir commercial dont se chargent cinq de ses hommes. Quand les travaux de réparation sont achevés, il décide de gagner les côtes espagnoles de l'Amérique – une gageure car son navire ne peut pas remonter l'alizé, il lui faudra donc aller chercher les grands vents d'ouest qui soufflent dans les hautes latitudes.
Il reprend la mer le 6 avril 1522, passe par les Mariannes à la mi-juillet puis, par 42° nord, subit une tempête qui l'oblige à revenir aux Moluques. Six mois après son départ, et n'ayant plus à son bord que 17 des 50 hommes qu'il avait emmenés, il jette l'ancre à Ternate. Les autorités portugaises le font prisonnier avec tout son équipage – tout comme elles ont fait arrêter les Espagnols restés à Tidore. Navire, cartes, instruments et livres de navigation sont saisis. La Trinidad coule peu après au mouillage.
En février 1523, après quatre mois de cachot, il est autorisé à entamer un long voyage vers l'Europe, toujours aux mains des Portugais. Il passe cinq mois dans la prison de Malacca et deux ans dans celle de Cochin (sur la côte de Malabar) avant d'arriver à Lisbonne au milieu de 1526, où il est encore incarcéré pendant sept mois. Il n’est libéré que sur la demande expresse de Charles Quint, qui l'honore en lui accordant une rente à vie, un blason où figurent "cinq îles et leurs arbres à clou de girofle" et la charge d'inspecteur "des navires qui vont aux Indes".

LE RETOUR DE LA VICTORIA EN ESPAGNE


Juan Sebastián Elcano part sur la Victoria, en compagnie de 47 Européens, dont le chroniqueur Antonio Pigafetta, et 13 Indiens. Il fait d'abord plusieurs escales, au cours desquelles un certain nombre de marins désertent, préférant les douceurs de la vie des îles aux incertitudes de ce voyage. Il pénètre dans l'Océan Indien le 12 février 1522, faisant un large détour par les hautes latitudes, les quarantièmes rugissants, pour éviter de rencontrer les navires portugais. Il passe Bonne-Espérance le 18 mai et remonte la côte atlantique de l'Afrique.
Le 9 juillet, à court d'eau et de vivres, il se résout à jeter l'ancre aux îles du Cap Vert, déclarant aux autorités portugaises qu'il revenait d'Amérique. Mais il est trahi par les bavardages de l’un de ses marins qui dévoile, lors de l’escale, qu’il appartient à la flotte de Magellan que les autorités portugaises recherchent depuis près de trois ans. Les treize hommes descendus à terre sont arrêtés par les Portugais qui tiennent à garder l’exclusivité des Moluques. Les autres, restés à bord de La Victoria reprennent la mer, cinglent vers l’Espagne, et arrivent à Sanlúcar le 6 septembre 1522. Il ne reste que 21 survivants dont trois Indiens. Le mardi 9 septembre, "nous, tous en chemise et pieds nus, allâmes, chacun une torche en main, à l'église de Sainte-Marie de la Victoire et à celle de Sainte-Marie de l'Atlantique, comme nous l'avions promis dans les moments d'angoisse." Lors de l'escale au Cap Vert, les navigateurs, qui se croyaient mercredi, apprirent qu'" il était jeudi, ce dont ils furent ébahis... car tous les jours, moi , rapporte le chroniqueur Pigafetta, qui étais toujours sain, avais écrit sans aucune interruption chaque jour. Mais... le long voyage avait emporté l'avantage de vingt-quatre heures. " Jules Verne s’inspira-t-il de cette expérience dans son roman ?

JUAN SEBASTIAN EL CANO


Né vers 1487 à Guetaria dans la province basque de Guipuzcoa. On a dit de lui qu'il était "quelque peu corsaire", sans doute parce que, lors d'une l'expédition à Oran en 1509, il avait vendu son navire pour se rembourser des dettes que les Finances royales avaient à son égard – ce que Charles Quint lui pardonne après son retour des Moluques. En 1519, il embarque sur la Concepción en tant que maestre et il semble bien qu'il ait participé à la mutinerie de la baie de San Julián. Quand la Concepción est détruite aux Philippines, il s’embarque sur la Victoria dont ses compagnons lui donnent le commandement.
De retour en Espagne, il est reçu par Charles Quint à Valladolid. Le roi lui accorde un blason sur lequel on pouvait voir le globe terrestre surmonté de la devise en latin "primus circumdedisti me" ("C'est toi qui le premier m'as contourné").
Son prestige et son expérience lui valent de siéger, aux côtés d'autres grands noms de la mer, comme Hernando Colón, Sebastián Caboto ou Américo Vespucci, au sein de la réunion qui se tient à Badajoz en avril-mai 1524, pour déterminer si les Moluques sont en territoire portugais ou espagnol. Il participe encore à l'expédition que Charles Quint décide d'envoyer dans les îles des Épices, sous le commandement de García Jofre de Loaísa, comme capitaine de l'un des sept navires qui partent de La Corogne le 24 juillet 1525. Après la mort de Loaísa, le 30 juillet de l'année suivante, en haute mer, il prend la direction de la flotte, mais il meurt à son tour cinq jours plus tard, probablement du scorbut et d'épuisement. L'Espagne honore sa mémoire en donnant son nom au bateau-école de sa Marine Nationale.

(D’après une étude de Annie Baert Agrégée d'espagnol. Docteur en études ibériques)