BASQUE-FRANÇAIS



             traduction

            







Les trois dames

Je dois vous dire ce que j’ai vu un de ces jours-ci. Je suis allé en Soule, devant voir quelques uns de mes amis qui collaborent au journal " Le Bon Basque ". Et, si vous voulez savoir la vérité, je ne regrette pas du tout d’avoir fait cet aller-retour. Pourquoi donc ? Que cela reste entre nous !.

Au retour, quand nous allions de Mauléon à Bayonne par le chemin de fer, tout le train était entièrement plein de monde. Et, d’abord, dans notre wagon nous étions pleins à craquer. Malgré cela, voilà que à Autevielle ou quelque part par là, sont montées avec nous, trois jeunes femmes, aussi vives et légères que le vent, délurées, excitées comme si elles venaient d’éteindre le feu, et parlant fort, mais très fort, et les trois en même temps, très bien habillées, avec chapeau, sans gants toutefois. Il est vrai qu’elle n’avaient pas besoin de gants qui auraient pu les gêner.

Sitôt entrées, leurs affaires jetées ça et là, sans " pardon bonnes gens " ou " bonjour " sans rien dire de tel, elles s’asseyent , une ici, les deux autres là, face à elle. Il semblait qu’elles n’étaient pas plus gênées de déranger les autres que si elles avaient été toutes seules. Plutôt préféraient-elles déranger tout le monde pour se faire remarquer, et, si elles le pouvaient, engager une dispute avec quelqu’un.

Quel yeux et quelles langues ! Tout l’intérieur de ce wagon qui peut contenir quarante personnes n’était pas assez pour elles. Raillerie, rire, bavardage. Six soldats allant à la maison le gosier échaudé à la table de l’auberge n’auraient pas fait plus de chahut que nos trois dames. Sans rien dire de censé, et sans tarir la parole, aux trois ça leur coulait comme la grêle. A propos du temps, du soleil, de la poussière, de l’impossibilité de reprendre souffle, de la soif, de la faim…Sais-je quoi et de quoi ? Elles-mêmes jasaient autant que dans tous les sabbats de sorcières.