BASQUE-FRANÇAIS



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LE DEPOUILLAGE DU MAÏS (6)

De dos à la porte, Pierre resta un moment à écouter le bruit de leurs sabots. Il avait, là devant lui, sous la pleine lune , les champs, les prairies, les vallons, blanchis de neige, tout lumineux,. Les bois, les taillis, les halliers, par contre, semblaient maintenant encore plus noirs que de jour. La rivière, comme un énorme serpent sombre, allait par son chemin éternel, en rampant tout bas, vers la mer, que l’on pouvait entendre, au loin, en train de rugir. De tous les côtés, les collines d’Olhasso, d’Hergarai, d’Amotz, d’Ibarron, couleur de cendre, étaient belles et , là-bas, à l’horizon, Sainte Barbe semblait être la montagne enfant de la grande La Rhune.

Au milieu du plus ravissant ciel étoilé, à gauche du Chemin de Saint Jacques, assez prés des constellations des Rois Mages et du Cocher, la lune, toute froide, mais très belle, regardait elle aussi, tous ces alentours qu’elle-même décorait si bien.. N’était-elle pas vraiment en train de regarder Pierre ,de ces hauteurs ? Elle venait maintenant au dessus d’Oihanalde, glissant tout silencieusement, comme nageant dans le ciel bleu. Et le jeune garçon voyait, là, dans cette lune-là, l’infortuné homme qui, ayant travaillé le dimanche, il y a deux mille ans ou à peu prés, fut pris et emporté dans les airs, avec malheureusement son fagot de bois sur le dos.

Il devinait aussi, au plus haut du ciel, les chiens de chasse du roi Salomon qui passaient en aboyant, sans cesse.

Il gelait à pierre fendre, dans les airs, sur terre, partout.

Mais Pierre n’avait remarqué ni le gel ni le froid, et il entra dans Oihanalde, avec un doux et pur tremblement, ayant envoyé du côté de Lizartza un très long regard affectueux.

Jean Barbier, né le 9 juillet 1875 à Saint-Jean-Pied-de-Port
et mort le 31 octobre 1931 à Saint-Pée-sur-Nivelle, est un prêtre
et écrivain basque d'expression navarro-labourdine.